Un nouveau projet de loi sur la Commission vérité, justice, réconciliation et réparations (CVJRR) est en train de se préparer au sein du parlement Centrafricain. La Commission aura pour objectif d’établir une attitude de vérité et de transparence envers les évènements politiques du pays et elle succèdera à la dernière Commission (CVR) de l’année 2003.
Malheureusement, la CVR de 2003 n’a pas atteint ses objectifs, et maintenant les spécialistes internationaux se posent la question si la nouvelle Commission peut changer la situation. Selon une chercheuse et spécialiste de la Centrafrique, Enrica Picco« plusieurs facteurs lui font courir le risque de subir le même échec que la Commission de 2003 ».
Pour rappeler, la CVR a été adopte le 15 septembre 2003 à Bangui. La République Centrafricaine traversait une longue crise sécuritaire à cette époque-là. La lutte acharnée entre deux candidats à la présidence a entrainé de nombreux conflits, assassinats et pillages envers la population civile.
La CVR devait rétablir la paix dans le pays et avait pour objectif de « établir une comptabilité précise des faits qui gangrènent la société centrafricaine depuis les années 60 jusqu’à ce jour ».
Néanmoins, il y a eu deux éléments clefs qui ont amené la CVR à l’échec. Premièrement, la Commission s’est appuyée sur les opinions de la population restreinte (seulement les habitants de la région centrale, de Bangui). Pourtant, il faut se rappeler qu’une grande partie de la population a été déplacée lors des conflits et s’est réfugiée dans des régions lointaines et dans des pays voisins. En plus, malgré les efforts des équipes mobilisés, la CVR est restée très centralisée. Par conséquent, cette centralisation a fait de sorte que la Commission était trop exposée aux différentes pressions politiques.
Deuxièmement, l’appui technique et financier de la CVR n’était pas suffisant pour répondre à ses besoins en 2003.
La situation politique a beaucoup évolué pendant toutes ces années, mais la plupart des facteurs cités ci-dessus restent actuels pour la nouvelle Commission de 2020. D’après Enrica Picco, la CVJRR est « l’expression sincère de la volonté des Centrafricains de tourner une page très sombre de leur histoire, celle du coup d’État de 2013 et des affrontements intercommunautaires qui l’ont suivi ». Pourtant, elle risque de devenir encore un engagement vide de sens.
En ce moment, la RCA se prépare aux élections présidentielles, donc les pressions politiques ne tarderont pas d’apparaître dans le pays. Les négociations de paix deviennent un outil politique pour protéger ses intérêts. D’un côté, il y a Touadéra et les groupes d’opposants réunis dans une nouvelle plateforme, de l’autre, il y a l’ex-président Bozizé qui revient à Bangui et veut proposer sa candidature à la présidentielle. Cela risque de déstabiliser le fonctionnement transparent et juste de la CVJRR. Les spécialistes s’inquiètent que cette « multiplication des institutions de justice » n’aidera pas à la lutte contre l’impunité et l’injustice en RCA.