Quelques jours après l’annonce officielle de renonciation à la nationalité française par Anicet Georges Dologuélé, des voix continuent de s’élever pour prendre position suite à cette décision risquée de l’homme politique centrafricain. C’est l’exemple du Coordonnateur de la «Synergie Centrafricaine», Dr Euloge Doctrouvé Koï, et la «Galaxie Panafricaine» de Blaise Didacien Kossimatchi.
En effet, ces deux leaders de la société civile centrafricaine, pensent qu’Anicet Georges Dologuélé, en renonçant à la nationalité française, selon le Code de nationalité centrafricaine, de 1961, celui-ci ne dispose plus de nationalité pour le moment, en attendant les procédures judiciaires au niveau de la République Centrafricaine.
Selon les leaders de ces plateformes de la société centrafricaine, la décision de renonciation à la nationalité française d’Anicet Georges Dologuélé et ses implications, est une décision, qui a fait l’objet de spéculations, et mérite une analyse claire et objective pour en comprendre les tenants et aboutissants juridiques et les conséquences pratiques pour l’intéressé, notamment au regard des législations française et centrafricaine.
D’abord, ceux-ci tiennent d’abord à féliciter Anicet Georges Dologuélé pour avoir enfin accepté de reconnaître l’autorité de la loi suprême du 30 août 2023, expression de la volonté du souverain peuple. Cependant, il sied d’épiloguer sur son intention réelle dans la décision de renoncer à sa nationalité française. Il s’est donc libéré des liens d’allégeance envers la République Française.
Mais qu’entend-on par allégeance ?
A suivre de près le développement fait par ces éminentes personnalités de la société civile centrafricaine qui sont un Juriste de formation et l’historien de son état, l’allégeance, est un engagement de loyauté, de fidélité et de soutien qu’une personne ou un groupe doit à une entité supérieure, comme un souverain, un État, un seigneur, ou une organisation.
Historiquement, le terme est très lié au système féodal où un vassal prêtait serment d’allégeance à son seigneur en échange de protection et de terres. Dans un contexte plus moderne, on parle souvent d’allégeance pour décrire la loyauté d’un citoyen envers son pays, d’un soldat envers son armée, ou d’un membre envers son parti politique.
En résumé, l’allégeance implique un respect des devoirs et des obligations envers l’entité à laquelle on est lié.
Les formes de renonciation
La renonciation à la nationalité française, n’est pas un acte anodin. Elle est strictement encadrée par le Code civil français, notamment l’article 23-4 qui autorise un citoyen français, s’il a une autre nationalité, à demander à perdre sa nationalité. Cette demande, si elle est acceptée, se fait principalement par déclaration ou par décret, chacune ayant ses propres conditions et procédures.
La renonciation par déclaration
Cette procédure concerne des cas spécifiques, comme la répudiation de la nationalité française d’origine pour les personnes nées à l’étranger où la répudiation suite à un mariage avec un étranger. L’enjeu juridique principal est de s’assurer que la déclaration remplit bien les conditions fixées par les articles du code civil (notamment les articles 18-1, 19-4 et 22-3). La perte de la nationalité prend effet à la date de la déclaration.
La renonciation par décret
C’est la procédure la plus courante pour un Français majeur qui réside à l’étranger et a acquis une nationalité étrangère. L’enjeu est ici de solliciter une «libération des liens d’allégeance envers la France», auprès du gouvernement français (article 23-4) du Code civil).
Autrement dit, la renonciation par décret marque une rupture volontaire du lien d’allégeance envers la France. Cette autorisation est accordée par décret et est soumise à l’appréciation des autorités. La perte de la nationalité prend effet à la date de la publication du décret.
Les enjeux juridiques
Les leaders ont rappelé les conséquences juridiques en France, à savoir la perte de la nationalité française qui a des conséquences profondes et souvent irréversibles sur la situation juridique de l’individu.
Ajouté à cela, la perte des droits civiques et politiques : la conséquence la plus immédiate est la perte des droits liés à la citoyenneté française, comme le droit de vote et le droit d’éligibilité aux élections.
Le statut d’étranger en France, se reconnait si la personne renonçant à sa nationalité souhaite vivre en France, elle devient un ressortissant étranger cela implique l’obligation de détenir un titre de séjour pour pouvoir résider et travailler légalement sur le territoire français.
La perte de la citoyenneté européenne : la nationalité française confère la citoyenneté européenne en renonçant à sa nationalité, l’individu perd également ce statut, ce qui peut effacer sa liberté de circulation et de résidence au sein de l’Union européenne.
La perte de la protection diplomatique : une personne ayant renoncé à sa nationalité française ne peut plus bénéficier de la protection diplomatique et consulaire de la France à l’étranger.
Conséquences juridiques et pratiques en République Centrafricaine
La renonciation à la nationalité française a des conséquences directes sur la situation d’un individu en Centrafrique, principalement parce que la législation centrafricaine a récemment adopté un principe de nationalité ‘’une et exclusive’’ ce principe est inscrit dans la Constitution de 2023 et a de fortes implications :
Principe de l’exclusivité de la nationalité : la nouvelle constitution centrafricaine en son article 10, alinéa 1 stipule que la nationalité centrafricaine est «une et exclusive» cela signifie qu’un citoyen centrafricain ne peut pas détenir une autre nationalité en même temps, sauf dans des cas d’exception qui doivent être déterminés par la loi.
Cette loi n’a pas encore été précisée, rendant le principe général d’exclusivité applicable la renonciation à la nationalité française est donc une condition nécessaire pour qu’un citoyen centrafricain puisse se conformer pleinement à cette disposition constitutionnelle.
Perte de certains droits politiques
La Constitution centrafricaine, exige d’être «Centrafricain d’origine et n’ayant que la seule nationalité centrafricaine» pour se présenter à la présidence ou à d’autres fonctions publiques de haut niveau. Un citoyen ayant une double nationalité, même s’il a une forte attache au pays, ne pourrait pas se présenter aux élections. La renonciation permet à Dologuélé d’être éligible à ces postes et de participer pleinement à la vie politique du pays.
Statut juridique en RCA : Si sa double nationalité, est officiellement remise en question, il sera contraint d’obtenir un titre de séjour pour pouvoir résider, travailler et investir en RCA.
Droit de vote : il perd le droit de vote et d’éligibilité si sa nationalité n’est pas rétablie suivant de nouvelles démarches administratives et judiciaires conformément au Code de la nationalité centrafricaine de 1961.
Les implications sur la double nationalité et les législations
La question de la double nationalité est au cœur de ce dossier. La législation française permet en principe la double nationalité, tandis que la nouvelle Constitution centrafricaine, adoptée en 2023, exige que le candidat à l’élection présidentielle soit exclusivement de nationalité centrafricaine.
La décision d’Anicet Georges Dologuélé, s’inscrit directement dans ce cadre. En renonçant à sa nationalité française, il cherche à satisfaire l’exigence constitutionnelle de la République Centrafricaine pour pouvoir se présenter à la prochaine élection présidentielle. Cette démarche souligne la complexité des parcours bi-nationaux face à des cadres législatifs nationaux qui divergent.
La renonciation à la nationalité française, une fois actée par décret, est irréversible dans l’immédiat. Le Code de la nationalité centrafricaine, quant à lui, prévoit des conditions d’acquisition et de perte de la nationalité, et il est important de s’assurer que sa renonciation n’affecte pas son statut de citoyen centrafricain.
Cette situation illustre parfaitement la nécessité de concilier les droits et devoirs liés à chaque nationalité, en particulier lorsqu’une ambition politique de haut niveau entre en jeu et que les législations des deux pays sont potentiellement contradictoires sur ce point précis.
La renonciation à la nationalité française est un acte juridique complexe qui, pour être valide, doit respecter des conditions strictes et entraine des conséquences importantes pour l’intéressé. Le cas de Dologuelé illustre les enjeux juridiques et les conséquences potentielles d’une telle démarche.
La sortie médiatique du Coordonnateur de la «Synergie Centrafricaine», Dr Euloge Doctrouvé Koï, et la «Galaxie Panafricaine» de Blaise Didacien Kossimatchi, sur cette question, ouvre un nouveau débat sur le plan juridique et politique en RCA.
C’est dire que l’annonce de renonciation à la nationalité française par Anicet Georges Dologuélé, ne représente est un coup d’épée dans l’eau. Cela ne représente n’est pas une solution facile pour qu’il puisse à sa candidature à la prochaine élection présidentielle de décembre 2025.
Il doit se soumettre à d’autres procédures juridiques au niveau de la RCA.
Saint-Cyr Gbégbé-Ngaïna