Les bats politiques de ces derniers temps sont alimentés par la question de la révision ou le changement de la loi mère mise à jour le 30 mars 2016. Ce sujet a tenté d’être soulevé pendant le Dialogue Républicain. Sauf que le président du présidium, Pr Richard Filakota et presque tous les participants ont renvoyé la responsabilité à l’Assemblée nationale et au Président de la République qui est le garant de la Constitution. A cet effet, plusieurs organisations de la société civile et certaines associations politiques continuent de noter des manquements graves dans la Constitution de la République centrafricaine du 30 mars 2016.
Pour débattre de cette question, l’Association politique dénommée «Tôngôlô Ti Bê Afrika», coordonnée par Stanislas Kokota Dobi, a organisé une Table Ronde le jeudi 14 avril 2022, regroupant les professionnels des médias et des leaders syndicaux centrafricains pour essayer de discuter pour voir comment sensibiliser les Centrafricains ou faire comprendre à la communauté nationale et internationale l’intérêt de ce sujet qui s’invite aujourd’hui dans les débats politiques centrafricains.
Au cours des discussions, ces leaders de la société civile ont émis des idées convaincantes qui aboutiront certainement à la modification de cette loi fondamentale.
Prenant la parole en premier, le leader du Réseau National pour la Sauvegarde des Acquis de la Paix (RNSAP), Davy Yannick Andjida, a soulevé que la loi mère peut être révisée. Celui-ci a défendu son idée en ce sens que la Constitution de la République centrafricaine du 30 mars 2016, comme tout le sais, a été rédigée à la va vite et surtout sous la pression de la Communauté internationale. Ce qui a fait qu’aujourd’hui, plusieurs articles ne répondent plus aux réalités de l’heure.
Même si certains pensent qu’il est inadmissible de modifier la Constitution, Davy Yannick Andjida, a lancé que seule la Bible qui n’est pas censée être modifier les chapitres et les versets. Car, c’est un document saint. «Mais, il faut souligner au passage que les Etats-Unis qui est un pays considéré comme le pays le plus démocratique au monde a connu 24 fois amendement dans sa Constitution. La France qui elle aussi considérée comme un pays démocratique a aussi subi plusieurs amendements ou révision de leur Constitution. En République centrafricaine ce jours, les choses ont réellement changé. Au regard de ces manquements, il est donc nécessaire de revoir certains articles de cette loi mère pour permettre à la RCA d’aller de l’avant», a-t-il souhaité.
Le deuxième intervenant qui répond au nom Rodrigue Mapanas, Coordonnateur du Mouvement des Jeunes pour le Développement (MJD), a pris la parole pour soutenir et défendre les raisons avancées par son prédécesseur.
Pour ce dernier, «il n’est plus question de cacher le visage avec un doigt de la main pour voir les réalités de la République centrafricaine. A l’heure actuelle, il est important de relever que nous ne discutons pas du mandat du président de la République. Mais, il y a certaines dispositions qui contiennent encore des termes transitoires qu’il est important qu’on puisse les revoir. Je peux citer l’exemple de l’article 154 de la Constitution où les termes président de la Transition, Haut Conseil de Transition… Ces quelques exemples sont légions et fondés», a-t-il soutenu.
Le troisième intervenant, Firmin Zoh Ponguélé qui est le Secrétaire Général du Groupement Syndical des Travailleurs de Centrafrique (GSTC) a, pour sa part fait mention de ce que «la Constitution du 30 mars 2016, a été un document innové, mais reflète la période qui a permis sa conception. D’ailleurs, les Centrafricains ne sentent pas l’effet de cette Constitution. En principe, la Constitution est un document qui devrait permettre aux travailleurs d’améliorer leurs conditions de vie. Malheureusement, depuis indépendance, la masse salariale des fonctions et agents de l’Etat n’a jamais changé», a-t-il constaté.
Et de renchérir en ces termes, «dans cette Constitution, ils ont créé le SENAT, alors que le pays ne dispose pas de ressources nécessaires afin de payer ces Sénateurs. En principe, cette Constitution présente plusieurs manquements pour ne pas dire caduc. Car, depuis 2016 jusqu’aujourd’hui, ces Sénateurs ne sont pas votés, faute de moyens. A mon humble avis, cette Constitution doit être toilettée dans le seul but d’améliorer les conditions de vie des travailleurs centrafricains».
Le quatrième intervenant, Mozia Kossogué, leader syndical, n’est pas passé par quatre chemins pour déclarer tout simplement que «nous sommes pour la révision. Parce que les travailleurs ne se retrouvent pas dans cette Constitution du 30 mars 2016. Pour ce travail, il ne faut pas perdre de vue que la République centrafricaine ne se limite pas seulement à Bangui. Il est important d’aller vers les Centrafricains qui se trouvent dans l’arrière-pays pour qu’ils se retrouvent également dans cette loi nationale au moment où le pays a retrouvé son calme après tout ce que le pays a traversé comme crise multidimensionnelle», a soulevé Mozia Kossogué.
Pour le cinquième intervenant, Wilfried Nguissimalé, président de l’USCC, a utilisé seulement quelques secondes pour décliner la position de son association pour confirmer que son association adhère entièrement à l’idée de la révision de la Constitution du 30 mars 2016, par voie de référendum bien sûr.
Le sixième et le dernier intervenant, Adamou Beppel, Secrétaire Général du Syndicat des conducteurs des Taxis et Bus en Centrafrique, a pris la parole pour s’exprimer en langue nationale le Sango et sorti un adage : «On ne bâti jamais une belle maison sous une pluie torrentielle». C’est le cas de la Constitution du 30 mars 2016 qui a été élaborée sous une pression accrue de la communauté internationale, notamment la France et au moment où le pays était sous la domination des bandits de grand chemin. «Si jamais le projet de révision de cette Constitution aboutisse, ce sera au bénéfice du peuple centrafricain. Donc, je m’adhère à cette idée», a-t-il lâché.
Enfin, le coordonnateur de l’association politique «Tôngôlô Ti Bê Afrika», Stanislas Kokota Dobi, a pris la parole pour faire la synthèse des idées agencées par les uns et les autres. «Dans cette Constitution du 30 mars 2016, il n’a pas été pris en compte un aspect capital où la Cour de Cassation est seule installée à Bangui. Mais, lorsqu’un Centrafricain qui se trouve à Kabo, Birao, Ouandja, Ouadda-Djallé, Obo, Mboki, Ndim, Koundé, etc. est mécontent d’une décision de la justice, comment il va faire pour faire un recours en Cassation ?», s’interroge-t-il.
Saint-Cyr Gbégbé-Ngaina