La deuxième Session Criminelle de la Cour d’Appel de Bangui de l’année en cours, a finalement bouclé ses travaux le 07 décembre 2022 dans la salle d’audiences de la Cour d’Appel de Bangui. Une manière de répondre aux aspirations du peuple Centrafricain qui a tant souhaité que la justice de leur pays soit rendue après les multiples crimes commis dans le pays.
Lancé le 07 novembre 2022, la deuxième Session Criminelle de l’année en cours, a pris fin le 07 décembre 2022 à Bangui. Une occasion pour le Procureur général, Jacques Ouakara, de faire un bilan de différents dossiers inscrits, selon le législateur national qui a préinscrit, par le biais de l’Article 220 de la Loi n° 10.002 du 16 janvier 2010, portant Code de procédure pénal de la République centrafricain, que dans le ressort de chaque Cour d’Appel, une session ordinaire peut-être organisée par semestre.
Cependant, les dates des sessions de la Cour Criminelle, sont fixées par décision du ministre de la Justice, après délibération de l’Assemblée générale de la Cour d’Appel de Bangui.
Pour le Procureur général, Jacques Ouakara, «lorsque les circonstances l’exigent, des sessions supplémentaires peuvent être organisées. C’est dans ce cadre légal que le ministre d’Etat en charge de la Justice, de la Promotion des Droits Humains et de la Bonne Gouvernance, Garde des Sceaux a, par décision n° 0052 du 14 octobre 2022, fixant la date de la deuxième Session Criminelle de la Cour d’Appel de Bangui, pour l’année 2022, en fonction de la délibération de l’Assemblée générale de ladite Cour, tenue en date du 31 mars 2022. L’exécution de cette décision ministérielle a donné l’opportunité au cabinet du Procureur général de soumettre au verdict de la Cour, vingt et cinq (25) dossiers, avec plus d’une trentaine d’accusés de nationalité centrafricaine, y compris d’autres nationalités», a-t-il précisé.
Ces présumés accusés sont poursuivis de crimes de sang, soit des crimes de diverses natures à travers des faits qualifiés d’association de malfaiteurs, de viol, d’assassinat, d’actes de nature à compromettre à la sécurité publique, de meurtre, de vol aggravé, de détention illégale d’armes et de minutions de guerre.
«Lors de cette session, aucune affaire n’a été examinée par la Cour d’Appel, selon la procédure de contumace», a précisé le Procureur général Jacques Ouakara.
Pour ce faire, les droits de la défense ont été scrupuleusement observés, dans la mesure où il a été procédé contradictoirement au tirage au sort des jurés, et à la commission d’office des avocats conformément aux règles de l’art, en date de 28 octobre 2022.
Cinq (5) formations du jugement ont été constituées, en vue de juger les dossiers inscrits au rang de cette deuxième Session Criminelle. En ce qui concerne la statistique générale, des dossiers enrôlés sont au nombre de vingt et cinq (25), jugés vingt et un (21), dossiers par contumace zéro (0), dossiers renvoyés (04), acquittements deux (02), condamnation à des peines des travaux forcés à temps treize (13), condamnation à des peines des travaux à perpétuité une (01), condamnation à de simples peines d’emprisonnement deux (2).
Sur la nomenclature des infractions retenues, le Procureur général, Jacques Ouakara, a précisé l’évaluation de différents dossiers examinés de la manière suivante, «assassinats (03), association de malfaiteurs six (06), atteinte contre les personnes usantes d’une protection internationale une (01), crime contre l’humanité et crime de guerre une (01), coups mortels trois (03), coups et blessures volontaires trois (03), détention illégale d’armes et de minutions de guerre trois (03), détention et consommation des chanvres indiens zéro (0), espionnage un (01), meurtre un (01), menace un (01), pédophilie deux (02), détention illégale d’armes, munitions et cartouches de chasse un (01), viols onze (11), vol aggravé deux (02) et séquestration un (01)».
S’agissant des difficultés rencontrées, visent les différentes étapes d’investigations, notamment la production des pièces à conviction, ainsi que la comparution des témoins et les parties civiles.
Au niveau des investigations préliminaires et de l’instruction préparatoire, les Officiers de Police Judicaires (OPJ) et les magistrats instructeurs étaient confrontés à diverses difficultés dans la mobilisation des éléments des preuves dans certains dossiers soumis à leur appréciation.
Il convient de noter qu’«ils ne sont pas aisés, de prendre la déclaration, ni la déposition de certains témoins à charge, des parties civiles et encore moins, de les identifier», a renchéri le Procureur général.
Ces difficultés sont dues, selon Jacques Ouakara, du fait que les populations ne coopèrent pas facilement avec le personnel de la chaine pénale. Les commissions rogatoires envoyées par les juges d’instruction ne sont pas souvent exécutés.
A cela s’ajoute le problème de difficile accès à certaines juridictions en raison de l’ignorance ou de la peur qu’éprouve une catégorie de justiciables. Ce qui revient à s’interroger sur le type de justice pénale à utiliser dans un pays poste conflit comme le nôtre.
Il a été noté que certaines pièces à conviction, notamment les armes blanches, objets de procédure criminelle, n’ont pas été présentés à la formation du jugement dans l’optique d’obtenir l’intime conviction des juges et jury populaire, composant la Cour.
Cette défaillance met en relief la problématique de la pièce à conviction, dans les dossiers criminels entre les services d’enquête et les autorités judiciaires, ainsi que l’épineux problème de la salle devant stocker lesdites pièces.
Un autre point soulevé par le Procureur général, c’est la comparution des témoins des parties civiles. Il a également relevé le défaut des parties civiles au cours de certaines audiences publiques. Cet état de fait, pose problème de l’identification, de la protection des parties civiles dans les procédures criminelles, mais surtout la peur encore une fois, qu’éprouve ces derniers.
Dans ce cas de figure, il serait judicieux de définir un cadre adapté à l’environnement sécuritaire, actuel dans le but de permettre aux OPJ et aux Magistrats instructeurs, de poser des actes d’investigation et d’instruction conformément aux règles de l’art.
Les pouvoirs publics et les partenaires techniques et financiers sont appelés à être attentifs aux défis liés au bon déroulement des enquêtes préliminaires et de l’instruction préparatoire.
Il revient de préciser qu’au dernier jour de cette deuxième Session Criminelle, le procès de l’espion Français Remy Juan Quignolot, accusé de tentative d’atteinte à la sureté intérieure de l’Etat, détention illégale d’armes et munitions de chasse et de guerre, est renvoyé pour la prochaine Session Criminelle de l’année 2023. La raison évoquée par la Cour est que son état de santé ne s’est pas encore amélioré. C’est ce qui l’a empêché d’être devant la Cour pour se défendre. Le Procureur général, a aussi affirmé que le sujet Français est toujours sur le territoire centrafricain.
Marcelin Endjikélé Kossikako